La hausse du coût des intrants donne plus d’importance à la performance technique.
Face à la crise agricole, les filières françaises ont souvent été mises à l’index de la compétitivité par rapport à nos voisins européens, notamment pour la productivité de la main-d’œuvre. Le moyen prôné pour améliorer le revenu des producteurs est l’agrandissement. C’est oublier un peu vite que, face à une hausse du prix des matières premières, la performance technique et l’autonomie des exploitations sont des préalables. De fait, tout agrandissement doit d’abord permettre d’améliorer cette technicité.
Stagnation des prix
La Pac de 1992 s’est accompagnée de la baisse du coût des concentrés et d’une stagnation du prix des produits agricoles.
Depuis plusieurs années, l’agriculture subit deux grandes tendances. Premièrement, une quasi stagnation des prix en euros courants, voire une diminution compensée en partie par les aides Pac. Deuxièmement, la hausse d’un certain nombre de charges parmi lesquelles les services, l’énergie (fuel, carburant, électricité…) et la baisse d’autres charges comme les concentrés. Ceci a entraîné une baisse des marges brutes hors primes et une diminution de la valeur ajoutée des exploitations. Ces dernières ont entrepris de s’adapter en s’agrandissant et en augmentant la productivité de la main-d’œuvre.
Retournement de tendance
Or, depuis 2008, l’agriculture est confrontée à un retournement de tendance, avec la hausse cyclique des matières premières (céréales, aliments, fuel…) et une baisse ou une stagnation des prix du lait, du porc, des bovins. Au terme des 2 ou 3 derniers exercices comptables, le constat est sans appel. Quand seul le prix de vente varie, chaque agriculteur subit la même variation de revenu. Quand les charges flambent, les systèmes «les plus voraces» en intrants divisent, par 2 ou 3, la valeur ajoutée dégagée par l’exploitation.
Cette baisse est telle que la situation financière se dégrade très vite, et n’est plus redressable sur les années qui suivent.
Les systèmes de demain seront donc les plus autonomes en intrants. La technicité est de plus en plus incontournable. Et certains critères revêtent un poids primordial : IC et coût alimentaire en porc, g de concentré/litre de lait, GMQ en viande bovine…
Des agrandissements structurants
Face à la crise agricole qui touche l’ensemble des productions, l’agrandissement pour augmenter la productivité de la main d’œuvre est souvent mis en avant. Mais dans l’environnement économique actuel, la première question à se poser est : «mon projet permet-il de maintenir voire d’améliorer la valeur ajoutée par 1 000 litres, par 100 kg de porc ?» Si la réponse est «non», il faudra y regarder à deux fois avant de le concrétiser. La base d’un système laitier, bovin, ou porcin est aujourd’hui le parcellaire. À partir de ce parcellaire, est-ce que le projet rend l’exploitation plus autonome ? Est-ce qu’il permet d’améliorer le coût alimentaire, d’organiser le temps de travail, de limiter le besoin en puissance et en carburant ?
De nombreux exemples montrent que, si cette logique n’est pas respectée, le résultat économique n’est pas au rendez-vous. Les agrandissements se gèrent aujourd’hui en termes d’opportunités et ce, d’autant, que la réglementation française ne facilite pas toujours les agrandissements structurants.
Anne-Yvonne Hénot
CERFRANCE Finistère